Apnée du sommeil
L'ostéotomie bimaxillaire avec rotation antihoraire : la guérison du SAHOS
Qu'entend-on par guérison ?

Commençons toutefois par nous poser cette question : qu’entendons-nous par guérison ?

Nous pouvons considérer que nous sommes guéris d’une maladie lorsque nous constatons une disparition totale et durable des symptômes de cette maladie et de ses conséquences, et que nous nous retrouvons dans une situation de santé antérieure à sa découverte. En ce qui concerne l’apnée obstructive du sommeil, un patient est guéri lorsqu’il dort bien, qu’il n’est plus fatigué le matin ni la journée, et cela peut s’objectiver par la polysomnographie, l’examen de référence qui vise à étudier la physiologie du sommeil.

L’intervention de chirurgie orthognatique avec une avancée bimaxillaire associée à une rotation anti horaire est la seule technique qui permette d’envisager une guérison avec une très forte probabilité (100% de guérison selon les études du professeur SAILER).

Physiopathologie du SAOS : les 10 notions clés

Pour comprendre de quoi il s’agit et avant d’approfondir le sujet, il faut se rappeler certaines notions inhérentes à la définition, à la physiologie et à la physiopathologie de l’apnée obstructive du sommeil.

  1. L’apnée obstructive du sommeil est liée à une fermeture du pharynx d’une durée d’au moins dix (10) secondes et qui se renouvelle au moins cinq fois par heure.
  2. L’obstruction totale (lors du sommeil) survient d’un point de vue anatomique le plus souvent en arrière du voile et en arrière de la langue.
  3. Les voies aériennes se ferment lors de l’inspiration, car les muscles dilatateurs du pharynx ne sont pas sollicités pendant le sommeil chez les patients souffrant d’un SAOS : la pression négative induite par l’inspiration provoque ainsi la fermeture du pharynx. Ce mécanisme risque d’autant plus de se produire que les voies aériennes sont rétrécies, c’est-à-dire quand les parois du pharynx sont proches les unes des autres.
  4. Les patients qui présentent un SAOS ont un rétrécissement des voies aériennes supérieures généralement présent sur l’ensemble de la longueur du pharynx, avec deux points de rétrécissement plus importants : derrière le voile et en arrière de la langue.
  5. À ce jour, aucun médicament ne permet de rétablir la tonicité des muscles dilatateurs du pharynx pendant le sommeil en présence d’un SAOS. La guérison de l’apnée obstructive du sommeil n’est pas possible par la prise de médicaments.
  6. Si une guérison est possible, elle s’appuie uniquement sur des techniques chirurgicales qui ont pour but d’augmenter le volume des voies aériennes supérieures, car on ne sait pas agir sur la tonicité des muscles par voie médicale (conséquence du point 6).
  7. Les chirurgies du pharynx (ou du contenu) ne maintiennent pas leur effet sur le long terme, sauf dans les cas particuliers où un élément anatomique a été clairement identifié comme étant la seule cause de l’apnée obstructive du sommeil. Cette situation est exceptionnelle (cf. point numéro 4).
  8. Une bonne position de la langue dans la bouche permet à celle-ci de ne pas être refoulée vers l’arrière pendant le sommeil. Ceci nécessite que la boîte à langue soit suffisamment grande.
  9. Le pharynx a une circonférence influencée par le positionnement du maxillaire et de la mandibule : ceci est lié en partie aux muscles génioglosse et palatoglosse qui s’insèrent pour l’un sur la partie antérieure de la mandibule et pour l’autre sur le maxillaire.
  10. Plus ces structures osseuses (le maxillaire et la mandibule) sont « en avant » et élargies, plus les muscles sont tendus, plus la langue est « tirée » vers l’avant, plus le voile est projeté vers l’avant, meilleure est la position de la langue dans son nouvel espace agrandi, avec pour conséquence un agrandissement du volume du pharynx. La probabilité d’une fermeture des voies aériennes lors de l’inspiration diminue alors de façon significative. C’est la voie de la guérison.

Dessins et illustrations : Sibylle Valle

Public cible de cette chirurgie

Cette chirurgie s’adresse à tous ceux qui souhaitent ne plus être dépendants d’une machine ou tout simplement à tous ceux qui souhaitent guérir et ne plus vivre avec cette épée de Damoclès que représente l’apnée obstructive du sommeil. En effet, la ventilation à pression positive (PPC) n’apporte pas sur le long terme de diminution des accidents cardio-vasculaires graves et, chez un sujet jeune, elle n’est pas facile à accepter, ce d’autant plus qu’elle doit être portée tous les jours, sur une durée minimale de quatre (4) heures et à vie !

Les chirurgies orthognatiques sont a contrario des interventions que l’on peut proposer à tous les patients qui le souhaitent et dont les examens clinique et complémentaires montrent une possibilité de guérison avec une forte probabilité. En effet, comme nous l’avons expliqué précédemment, on constate chez un grand nombre de patients qui présentent un SAOS un recul du maxillaire et/ou de la mandibule. Ainsi, le chirurgien peut dans l’immense majorité des cas envisager cette chirurgie avec une avancée de la mandibule plus ou moins associée à une avancée du maxillaire.

Dans cette hypothèse, la probabilité de guérison est importante. On peut également envisager, par un traitement orthodontique conjoint, de corriger les défauts de positionnement dentaire, dont le patient profitera à plusieurs niveaux avec cette chirurgie : stabilité dentaire, amélioration esthétique du sourire, guérison de l’apnée. L’arsenal thérapeutique est donc très simple pour les patients qui ont un recul de la mandibule et/ou du maxillaire. Cette chirurgie est de nos jours très courante pour des raisons orthodontiques, et il semble logique que l’indication s’étende pour les patients qui ont une apnée obstructive du sommeil avec un défaut de croissance des mâchoires. Mais comment raisonner pour les patients dont les voies aériennes sont étroites et qui n’ont pas de recul de la mandibule et du maxillaire et qui souffrent d’une apnée obstructive du sommeil ?

Exemple 1 : opération classique d'apnée du sommeil

Je vous donne l’exemple ci-dessous d’un patient opéré de façon classique d’une apnée du sommeil. L’amélioration de la respiration a été immédiate et la guérison a été confirmée au troisième mois par la mesure des voies aériennes et de l’IAH.

Opération apnée du sommeil
Opération apnée du sommeil
Opération apnée du sommeil
Opération apnée du sommeil
Exemple 2 : opération d'apnée du sommeil avec rotation antihoraire

Je vous donne l’exemple ci-dessous d’un patient opéré selon le même protocole d’une apnée du sommeil obstructive mais avec une rotation antihoraire associée modérée (dans ce contexte particulier) pour augmenter l’avancée mandibulaire et avec une antéposition des apophyses géni dans le même temps opératoire. L’amélioration de la respiration a été immédiate et la guérison a été confirmée au troisième mois par la mesure des voies aériennes et de l’IAH comme c’est le cas habituellement.

Opération apnée du sommeil
Opération apnée du sommeil
Opération apnée du sommeil
Opération apnée du sommeil
Opération apnée du sommeil
Opération apnée du sommeil
Adaptation de la chirurgie aux patients non ciblés

Cette situation (voies aériennes étroites sans recul associé de la mandibule et du maxillaire) est certes rare, d’autant plus que l’on avance en âge, car, en vieillissant, les structures osseuses du visage se « remodèlent » et reculent (c’est notamment l’une des causes de l’apparition de lèvres fines, d’un visage creusé et de l’apparition de rides marquées chez le sujet âgé). Néanmoins, pour de très rares patients qui présentent une apnée obstructive du sommeil, le maxillaire et la mandibule sont en bonne position. Que peut-on leur proposer pour les aider à guérir ?

La solution est venue du professeur Hermann Sailer, ancien chef de service de chirurgie maxillo-faciale à l’hôpital universitaire de Zurich en Suisse. Afin de permettre à des patients a priori non éligibles à la chirurgie orthognatique de bénéficier de ce traitement, il a eu l’idée de modifier les protocoles chirurgicaux pour finalement mettre au point une méthode chirurgicale radicale pour la guérison des apnées obstructives du sommeil qui s’applique aux patients qui n’ont pas de recul du maxillaire ni de la mandibule.

Il a en effet réussi à modifier, par voie chirurgicale, le positionnement de ces structures sans avancer le maxillaire. La technique utilisée s’apparente à une rotation (antihoraire) du maxillaire qui oblige à une avancée de la mandibule. Elle consiste à avancer le maxillaire qui est en rapport avec le pharynx, mais sans pour autant le déplacer vers l’avant. Cela est possible par une rotation du maxillaire, en prenant comme point de rotation la partie située la plus en avant de celui-ci. Ainsi, le maxillaire s’avance à l’arrière (c’est ce qui nous intéresse) puis le chirurgien place la mandibule en rapport avec le maxillaire. Pour se faire, il doit donc l’avancer. C’est un peu technique, et il n’est pas nécessaire de rentrer dans le détail ici, mais globalement, ce que l’on peut retenir, c’est que le Pr Sailer a démontré qu’il était possible d’obtenir des taux de guérison très élevés (proche de 100 %) grâce à ce protocole pour tous les patients. Cette technique peut également être associée à une avancée du maxillaire (et de la mandibule) afin d’optimiser les résultats. La guérison est alors la règle dans l’immense majorité des cas.

Le protocole Sailer

Il est à noter que le professeur Hermann Sailer et son épouse, le Dr Erica Sailer, ont reçu en 2021 le prix European Awards in Medicine pour l’ensemble de leurs travaux, dont ceux portant sur l’apnée obstructive du sommeil. Le site de l’European Awards précise qu’ils ont poursuivi le développement de la méthode chirurgicale pour la guérison des apnées obstructives du sommeil et que cette chirurgie permet non seulement de guérir l’apnée du sommeil, mais aussi de prévenir les conséquences sur la santé telles que l’infarctus du myocarde, l’attaque cérébrale, le diabète de type 2, la démence, etc…

Le Pr Sailer est l’un des experts les plus expérimentés au monde dans le domaine de la chirurgie maxillo-faciale, ayant réalisé avec succès des milliers d’opérations compliquées en plus de trente ans à l’hôpital universitaire de Zurich et dans sa propre clinique. Il a en outre développé d’autres méthodes de chirurgie pour d’autres maladies.

Après avoir rencontré le professeur Sailer à l’Hôpital universitaire de Zurich dans les années 1990 nous reproduisons avec l’ensemble de mon équipe de Paris (à la clinique Blomet) et de Toulouse (à la clinique de la Croix du sud) très exactement son protocole initial : avancée et rotation antihoraire du maxillaire et de la mandibule. Nous retrouvons des taux de guérison comparables aux siens. L’ensemble des protocoles ont été enrichis par une simulation tridimensionnelle systématique de l’intervention avec mesure du volume des voies aériennes supérieures en amont de l’intervention. Celle-ci est renouvelée au troisième mois post opératoire. Une disparition des symptômes liée à l’apnée obstructive du sommeil, associé à un IAH inférieur à 5 ou à 10 (en fonction de la valeur initiale pré opératoire) et à une augmentation du volume des voies aériennes calculée à partir du scanner confirme la guérison dans l’immense majorité des patients opérés. Ceci s’associe le plus souvent par une normalisation de la tension artérielle (lorsque les patients présentent une HTA), et nous constatons également des baisses du taux du LDL cholestérol pour les patients qui avaient une hypercholestérolémie.

Situation initiale avant chirurgie
Situation initiale avant chirurgie
Rotation antihoraire du maxillaire
Rotation antihoraire du maxillaire
Impact esthétique annulé
Impact esthétique annulé
Résultat en fin d'intervention
Résultat en fin d'intervention
Témoignage d'une patiente

La chirurgie orthognatique pour une guérison de SAOS : déroulement type

  • Arrivée le jour même ou la veille de l’opération.
  • Première nuit postopératoire en clinique ou à l’hôpital.
  • Sortie le lendemain (en général).
  • Suites inconfortables, mais non douloureuses (en général).
  • Alimentation de consistance molle pendant une durée de six à huit (6-8) semaines.
  • Le visage est gonflé pendant deux à trois (2-3) semaines.
  • La lèvre inférieure est engourdie (pendant plusieurs semaines en moyenne).
  • La sensation de bien respirer est en général immédiate.
  • La reprise d’activité sportive est rapide (après quelques jours).
  • La reprise de l’activité professionnelle survient en moyenne à la troisième semaine.
  • Le taux de guérison est de 80 % à 95 % selon les études scientifiques et les indications. Ce taux de guérison est supérieur à 95% avec le protocole du professeur Sailer si l’indication est bien posée.
  • En l’absence de guérison, l’amélioration de la ventilation est toujours significative et permet un sevrage de la PPC dans l’immense majorité des cas.

Cas clinique

Prenons la situation de M. F., un patient âgé de 30 ans atteint d’un SAOS de forme « sévère ». Un traitement est institué en urgence une fois le diagnostic posé, car M. F. se sent épuisé, est gêné dans ses études et souffre d’une HTA vraisemblablement secondaire à son apnée.

Le traitement de choix en urgence est la PPC : le traitement est facile à mettre en place, il est efficace sur les apnées sévères. Après plusieurs mois d’observance, une réévaluation du traitement est envisagée : celui-ci convient-il ou non  ? Après six mois de traitement avec la PPC, notre patient décide d’envisager une solution radicale, principalement parce qu’il souhaite ne plus être dépendant d’une machine (malgré une relative bonne tolérance). M. F. fait le choix de se faire opérer d’une avancée bimaxillaire avec une rotation antihoraire.
F. arrive la veille de l’opération avec sa machine. Il en sort le lendemain et dès le soir de l’intervention, il cesse de dormir avec l’aide à la ventilation. Très rapidement, il dit se sentir mieux qu’avant l’opération, malgré l’absence d’aide ventilatoire. La tension arterielle sous traitement était de 150/90 en moyenne en autocontrôle avant l’opération. À la sortie de la clinique, la tension est descendue à 140 (systolique) puis la tension continue de baisser pour se stabiliser à 105/70 à la sixième semaine. Au troisième mois, le cardiologue décide d’arrêter son traitement.
On peut noter aussi que M. F. a commencé à maigrir rapidement après l’opération. Cela est dû au post opératoire mais aussi au fait qu’il s’est rapidement senti reposé. Je demande à son épouse si elle a noté des difficultés la nuit depuis l’opération, ce qu’elle dément : « Il fait des nuits entières sans se réveiller et sans aller aux toilettes. Il ne me réveille plus la nuit. Avant il me réveillait lorsqu’il reprenait sa respiration et lorsqu’il ne respirait pas. Ce n’est plus le cas. Je ne l’entends plus ronfler. Il respire calmement et doucement. »

Trois mois après l’opération un nouvel enregistrement polysomnographique du sommeil est réalisé. Celui-ci confirme la guérison.

Exemple 3

Par cet exemple ci-dessous vous pouvez comprendre qu’une rotation antihoraire même avec une avancée minime du maxillaire permet la guérison de l’apnée obstructive du sommeil. La mandibule est ainsi fortement avancée et le visage ne change quasiment pas.

avancée mandibulaire
avancée mandibulaire
avancée mandibulaire
avancée mandibulaire
avancée mandibulaire
avancée mandibulaire
avancée mandibulaire

Pour en savoir plus sur l’apnée du sommeil : https://apneedusommeilfrance.com/